Accès nocturne à l’alcool
Alors que le National refuse de le limiter et que nombre d’autorités se débattent avec les excès en tout genre, la grogne monte parmi les habitants des centres-villes.

Les jeunes et l’alcool minent-ils les nuits de Suisse romande?
Bruit, bagarres, déprédations en tout genre, rues jonchées de bouteilles brisées ou à moitié vides: les débordements de la vie nocturne appartiennent au quotidien des locataires des centres-villes. Où le sentiment d’insécurité va grandissant à la nuit tombée.
A Lausanne, devenue capitale de tous les fêtards, la nouvelle Municipalité serre enfin la vis et parle désormais de «pacifier» ses nuits en trouvant un «équilibre entre la vie nocturne et les impératifs de tranquillité et de santé publique».
Comprendre: restrictions d’ouverture et limitations des ventes d’alcool en vue. A Genève, où des entreprises internationales ont à plusieurs reprises dénoncé une insécurité croissante, la vente d’alcool est désormais interdite entre 22 heures et 6 heures du matin.
D’autres communes réfléchissent à des mesures adéquates, piochées notamment dans le catalogue dressé l’hiver dernier par l’Union des villes suisses. Quant aux causes, il y a d’abord la dérégulation des lois cantonales sur les établissements publics au milieu des années 1990. Un peu partout a-t-on alors assisté à une explosion du nombre de bars et autres établissements de nuit. A Lausanne, leur nombre est passé de dix-sept en 1995 à une quarantaine aujourd’hui.
Certains pointent du doigt une jeunesse dont la violence a effectivement doublé dans l’espace public en vingt ans, selon une étude du programme de prévention «Jeunes et violence» . D’autres insistent sur les effets collatéraux d’une libéralisation des horaires d’ouverture des débits de boissons, et sur des prix trop accessibles, alors même que le Parlement vient de renoncer à légiférer sur ce point.
Les sociologues y ajoutent la mobilité simplifiée et l’influence des réseaux sociaux facilitant l’organisation de «botellon», réunions au cours desquelles les jeunes s’enivrent dans des espaces publics.
«Avant d’interdire, montrons-nous cohérents»
Gabriel Bender, sociologue, répond à nos questions.

Il n’y a aucune gloire à finir à l’hôpital parce que l’on a trop bu. Cela dit, je peux comprendre la jeunesse qui recherche des états-limite. Les possibilités d’emploi se réduisent, l’entrée dans la société se complique aussi pour certains. Et puis cette jeunesse commence de plus en plus tôt, et se termine aussi de plus en plus tard. Il y a un rajeunissement inquiétant de certains comportements. La loi des «adultes» apparaît donc plus difficile à faire appliquer, et cela me semble problématique. Je défends le droit à l’ivresse et le fait que l’alcool n’est pas pour les enfants, un point c’est tout.
Auteur: Pierre Léderrey
Photographe: Keystone, LDD,