François, le pape le plus…?
Premier Sud-Américain, premier jésuite à accéder au trône de Pierre, certes, mais quelle sorte de pontife sera le cardinal Bergoglio? Echantillons de grands modèles, pas tous recommandables, qui ont marqué l’histoire de la papauté.


Le plus coriace
Saint Pierre évidemment. Suivant le mode de calcul, – par exemple de 30 à 64 – son pontificat fut non seulement le premier, mais aussi le plus long. Seul pape issu des milieux piscicoles.
Le plus héréditaire
Silvère, qui régna de 536 à 537 et était fils d’un autre pape, Hormisdas (514-523). Mais attention fils légitime, né avant que papa n’entre dans les ordres. Plus sulfureux, Jean XI (931-936), fils présumé et illégitime de Serge III (904-911) qui l’aurait eu avec la concubine Marozie, sa maîtresse, âgée de 13 ans.
Le plus calculateur
Sylvestre II, de son vrai nom Gerbert d’Aurillac, pape de l’an mil et premier pape français. Qui fut d’abord un savant tout terrain dont le fait d’armes considérable reste d’avoir introduit les chiffres arabes en Europe.

Le plus jeune
Benoît IX, élu en 1032 sous la pression de son père le comte de Tusculum, à l’âge de… 12 ans, selon certaines sources. Mais plus probablement vers 20 ans. Pour d’autres le plus jeune pape serait Jean XII, de la même famille que le précédent, élu à l’âge de 16 ou 18 ans en 955, dans des circonstances assez similaires.
Le plus attendu
Grégoire X (1271-1276) élu après un conclave qui dura trois ans et ne s’acheva que parce que les cardinaux furent enfermés avec seulement du pain et de l’eau, dans un palais dont on retira le toit «afin de permettre aux influences divines de descendre plus librement sur leurs délibérations».

Le plus scandaleux
Alexandre VI, autrement dit Rodrigo Borgia. Père de six enfants, élu en 1492 après avoir probablement acheté quelques votes. Pour un pontificat de bruit et de fureur: corruptions, vols, meurtres, viols, luxures et cérémonies pas toujours catholiques. Tel un concours de danse réunissant cinquante prostituées nues. Ceux qui protestent, comme Savonarole, sont arrêtés, torturés, exécutés et jetés dans le Tibre. A sa mort, le bruit court: ce pape-là a passé un pacte avec le diable.

Le plus bref
Urbain VIIqui régna pendant treize jours, du 15 au 27 septembre 1590. Titre qui ne peut être contesté par Etienne, prêtre élu pape en mars 752 mais qui mourut d’apoplexie trois jours après, avant d’avoir pu même être ordonné évêque. Ni par Philippe, pape d’un jour, le 31 juillet 768, ou plutôt antipape, plus reconnu aujourd’hui par l’Eglise catholique.

Le plus détesté
Léon XIII, élu en 1878 en raison de sa santé fragile pour faire un pape de transition. Il déjouera les pronostics, mourra à 93 ans après vingt-cinq ans de règne, sera le premier pontife «social», à s’intéresser à la question ouvrière, à dénoncer «la concentration entre les mains de quelques-uns de l’industrie et du commerce, devenus le partage d’un petit nombre d’hommes opulents et de ploutocrates». A tel point que les plus catholiques d’entre les fidèles eurent le soupçon qu’un imposteur avait pris la place du vrai pape à Rome et que dans certaines pieuses paroisses on priait «pour la conversion du pape».

Le plus silencieux
Pauvre Pacelli! Son pontificat sous le nom de Pie XII se résume désormais à cette seule polémique: a-t-il par son silence cautionné les agissements des nazis? Certains historiens disent que oui, considérant que pour faire ce qu’ils ont fait «Hitler et ses acolytes devaient être convaincus que le pape ne protesterait pas». D’autres que non, estimant à 850 000 le nombre de juifs dans les territoires du troisième Reich qui ont pu être sauvés grâce à l’action discrète de l’Eglise.
Le plus faussement bonhomme
Elu comme conservateur de transition, le rondouillard Roncalli, alias Jean XXIII, ne sera ni l’un ni l’autre. Malgré un pontificat bref, interrompu par un cancer à l’estomac, il aura le temps de placer dans l’Eglise, en 1962, la bombe atomique de Vatican II. Tout en gardant sa réputation d’homme proche du peuple et son affectueux surnom d’«il papa buono», le bon pape.

Le plus polonais
Incontestablement Karol Wojtyla, seul ressortissant de ce pays à décrocher le siège de Pierre sous le nom de Jean Paul II. Sa nationalité fut la première d’une longue liste de stupéfactions et superlatifs: le plus athlète, le plus intransigeant, le plus politique, le plus charismatique, le plus malade, le plus santo subito. Si l’on était Polonais, on ajouterait: le plus grand pape de tous les temps.
Auteur: Laurent Nicolet
Photographe: Keystone, Ullstein,, PA,